Un synopsis et quelques extraits du nouveau livre de Marc Rameaux « Portrait de l’homme moderne » :
Grégoire est un homme
croyant aux vertus de la société libérale moderne. Celle-ci garantit pour lui
ouverture d’esprit, récompense du mérite, prospérité et respect du droit dans
la société. Dans les yeux de Grégoire, elle est le sommet du monde civilisé. Il
en joue pleinement le jeu, avec un engagement et des qualités personnelles
indéniables.
Moderne candide, mais moins
naïf qu’il n’y parait, Grégoire recèle un autre versant de sa personnalité qui
lui souffle que les règles du jeu pourraient être différentes de ce qu’il avait
imaginé. Cette autre face lui permet d’être entouré d’amis véritables, malgré
son apparente superficialité, communauté d’amis qui lui apportera une aide
décisive à un moment critique de sa vie.
Grégoire vivra des
expériences remettant en question ses convictions et découvrira les clés
véritables de la société moderne. Il prendra conscience des labyrinthes et des
toiles qui peuvent prendre les hommes au piège. Il goûtera enfin ce que sont le
prix et les conditions d’une véritable liberté.
"Le portrait de
l'homme moderne" est en ligne, au format papier et kindle :
Quelques extraits :
« Mais M.
Augustin ce n’est pas possible de pervertir à ce point ce qui nous a été
enseigné. Comment cela peut-il exister, quel nom est-ce que cela peut porter.
Quelqu’un qui fait passer pour moitié sa lâcheté et pour moitié son avidité
personnelle pour des valeurs de progrès, qui déguise ses instincts en marche
irrésistible de la civilisation, qui est veule avec les petites frappes de
toutes les classes sociales mais réprime seulement ceux qui ne peuvent se
défendre ou respectent les règles, comment cela peut-il se nommer. »
« Oh, cela c’est
simple Grégoire. Cela s’appelle un membre du parti socialiste. M. Amboise en
est un je crois. »
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André réplique :
« T’es-tu déjà demandé ce que signifie l’expression « le
meilleur » ? Et qu’elle n’a aucun sens si tu ne précises pas le critère (il
appuie ce mot) par lequel tu mesures ce qui est meilleur ou pas. En théorie des
jeux, ce critère s’appelle la « fonction objectif ». C’est celle que
tu cherches à maximiser. La mise en concurrence est le moyen le plus efficace
connu – c’est là la part de vérité de ton cher libéralisme – pour atteindre et
maximiser la fonction objectif le plus rapidement possible. Mais c’est un moyen
et non une fin : si tu fais une compétition de ping-pong, tu
sélectionneras les meilleurs pongistes, si tu fais une compétition de football
américain, les meilleurs dans ce sport : tu conviendras qu’ils n’auront
pas tout à fait le même profil et les mêmes qualités … »
« Soit, mais où
veux-tu en venir ? »
« Eh bien si tu
fais une compétition de bassesse et de servilité, tu obtiendras les
« meilleurs » dans ces belles qualités. Et de surcroît tu les
obtiendras avec une rapidité et une efficacité extraordinaires.» repartit-il en
riant. « Un certain Jonathan Swift l’avait déjà remarqué il y a quatre
siècles. Le libéralisme est un moyen très efficace, il peut donc te mener aussi
très rapidement et très efficacement le nez dans la boue. Et tu t’écriras
« quelle efficacité ! » » finit-il hilare.
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« Mais
comment est-ce que tu qualifierais le profil de ces nouveaux dirigeants ?
A quoi correspondent-ils ? Il doit bien y avoir un moyen de s’en prémunir
si l’on sait quel type d’hommes ils sont. »
« Oh là-dessus
Grégoire c’est assez simple. Cliniquement ce sont des psychopathes. Et toute
l’affaire du monde moderne que tu aimes tant, cela a été de remplacer les
dirigeants véritables par des psychopathes. Des hommes capricieux,
narcissiques, ne songeant qu’à leur propre plaisir immédiat, dénués de
jugement. Dans le mode de fonctionnement que je t’ai décrit, cela marche très
bien : on prend leurs caprices pour de l’esprit de décision, parce qu’ils
les expriment avec force, comme un enfant qui tape du pied ou se roule par
terre. Il y a 40 ans, l’on aurait considéré cette attitude comme indigne d’un
véritable décisionnaire. De nos jours, la permissivité généralisée les fait
considérer comme des profils de leaders. Bien sûr, ils ont travaillé leur façon
d’être pour que cela ne se voie pas trop. Et savent reproduire tous les aspects
extérieurs d’une attitude policée et maîtrisée. Mais si tu examines la façon
dont ils prennent in fine leur décision, de façon superficielle, avec une
incompétence totale sur leurs dossiers, en fonction uniquement des rapports de
force internes à leur organisation et non sur des critères de fond, leur
apparence cache très mal les instincts d’un enfant capricieux et mal
grandi.
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« Méfie-toi Grégoire.
Tu te souviens de la période noire de France Telecom, celle où les suicides
s’accumulaient, ou encore les situations de harcèlement moral. Ce n’étaient
même pas les indésirables, les bons à rien ou les bras cassés qui subissaient
les pires traitements de harcèlement. Tu te souviens de cet homme à qui l’on
avait retiré son lieu de travail sans rien lui dire en espérant qu’il
craquerait ? C’était l’un des éléments les plus brillants de l’entreprise,
imaginatif, entreprenant, ayant déposé une multitude de brevets. Au bout d’un
certain temps, les dirigeants actuels trouvent ces hommes trop dangereux et en trouveront
toujours un autre pour le remplacer avec le même jeu de dupe, en lui faisant
croire à la reconnaissance du mérite, reconnaissance qui ne viendra jamais mais
qui aura permis d’exploiter son « jus » au maximum. Les véritables
entrepreneurs dans la grande entreprise, ne font que souligner la vacuité et la
nullité de leurs dirigeants. Et même si ces derniers ont tout, reconnaissance,
titres, salaires mirobolants, le peu que les véritables leaders ont pu acquérir
est encore trop pour eux, car ils savent très bien qu’à la différence d’eux, il
s’agit de récompenses légitimes. L’arrogance et l’agressivité des classes
dirigeantes de maintenant est à la mesure de leur incapacité : leur totale
incompétence les rend nerveux, car ils savent qu’elle a de plus en plus de
chances d’être démasquée et de provoquer une révolte. »
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Je pensais à quelque chose
de très curieux, de paradoxal. Mes collègues Nicolas et François ou un M.
Sivert font tout pour se valoriser et se mettre en avant. Ils se rouleraient
par terre pour un signe qui les distingue des autres. Et ce faisant, ils
deviennent complètement interchangeables : il est facile de remplacer des
gens comme cela, parce qu’ils n’apportent rien de réel, ils se consacrent
entièrement à leur auto-promotion, et sont une multitude. Tandis que Jean lui,
s’efface, disparaît, demande presque volontairement l’anonymat. Et ce faisant,
il devient au contraire un homme d’exception. Ceux qui mettent outrageusement
leur ego en avant deviennent des pantins que rien de distingue d’un autre de
leur espèce, tandis que celui qui fait taire son ego devient une personnalité
exceptionnelle.
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« Le pire Grégoire,
c’est que vos sociétés prétendent être libres. Elles me font penser à ces
courses de chiens où chaque animal se trouve complètement encadré dans un
couloir, avec la seule possibilité de courir devant lui. « Mais si, vous
êtes libres » vous dit-on, « vous pouvez courir » ! Le
terme est déjà fixé à l’avance, ainsi que vos possibilités. La petite minorité
qui a confisqué le pouvoir détient aussi tous les leviers de votre destin, en
exploitant au maximum vos capacités à son seul profit : quiconque ne
rentre pas dans le jeu malsain qui les a fait se reconnaître devra subir leur
système de captation de toute votre richesse. Ou bien devrez-vous subir un exil
forcé, généralement dans des conditions très difficiles. Vous êtes aussi
semblables aux rats de laboratoire placés dans un labyrinthe. « Mais si
vous êtes libres » vous dit-on. « Vous pouvez parcourir le
labyrinthe ». Oui, et la sortie et le terme sont déjà fixés et uniques.
C’était exactement comme cela en URSS : un système où les hommes étaient
piégés, où le double discours était la norme, où les jeux d’intérêt personnels
de chacun étaient exploités au maximum non pour le bien de la société, mais
pour l’accroissement continu de l’oppression. »
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« Mais cela sera
difficile à tenir M. Augustin. La pression sociale vous oblige quelque part à
reconnaître et admirer ceux qui dans notre société parviennent au sommet du
pouvoir et de l’argent. Même si ce sont par des moyens dévoyés qu’ils les ont
obtenus. Que feriez-vous si l’un de nos dirigeants économiques ou politiques venait
visiter votre village ? »
« Oh c’est déjà arrivé
Grégoire ! Et il a dû vivre l’une des expériences les plus désagréables de
sa vie. Lui qui à chaque instant doit faire impression avec son argent et son
pouvoir ne suscitait ici qu’indifférence et mépris. Il pouvait lire dans les
yeux des membres de la communauté qu’ici, il ne valait rien. Lui qui se voyait
au sommet de la société, n’était regardé dans le village que comme une sorte de
porc décadent. Lui qui se pensait un prédateur s’impressionnant lui-même par
son pouvoir sentait qu’il n’aurait jamais fait le poids dans n’importe quel
combat, physique ou mental, face aux samouraïs surentraînés du village.
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« Mais les dirigeants
actuels continuent de tenir le discours d’un état de droit, d’une justice la
même pour tous, d’opportunités économiques pour les meilleurs, de la
responsabilité, du civisme et de la démocratie. »
« Ils continuent de le
tenir Grégoire, mais plus personne n’est dupe. Tout le monde sait bien
maintenant que la règle du jeu n’est pas celle-là. Et que la
« liberté » qu’ils offrent est de se conformer à leur seul modèle
répugnant de réussite, assoiffé d’argent et de pouvoir, ou d’être broyé
lentement si l’on ne rentre pas dans ce jeu dépravé. La belle liberté que
voilà ! La machine économique est subtile, car elle permet de détruire à
petit feu ceux qui ne se conforment pas à ce modèle, et même de faire dire
qu’ils en sont responsables. La surprise viendra du fait que les prédateurs ont
l’habitude de ne rencontrer des oppositions que sous forme de plainte ou de
revendications, ce qui les renforce dans leur caractère imbu d’eux-mêmes,
d’être les forts de la société. Quand ils devront faire face à des hommes
totalement déterminés et libres, de véritables combattants accomplis dans leur
réalisation, ne leur demandant rien et n’ayant pas une once d’estime ou de
respect pour eux, ils seront démasqués. »
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« Imagine un peu
Grégoire, l’exemple que cela produira sur la société. Elle verrait des hommes
engagés, désintéressés, liés par la passion des disciplines nobles qu’ils
pratiquent, excellents dans leurs domaines, humbles mais implacablement
déterminés, n’ayant besoin d’aucun signe extérieur de richesse, exemplaires
dans leur contribution à la collectivité tout en étant individuellement
accomplis, nullement prédateurs mais impressionnants de force et de discipline,
prêts enfin au sacrifice pour la communauté, ne demandant en retour que
l’anonymat, et pour cela se distinguant. Et en face, leurs dirigeants
économiques et politiques actuels. N’étant parvenus à leurs postes que par la
tricherie, la récupération, les manœuvres de couloir. Superficiels, infantiles,
narcissiques. Se roulant par terre comme un enfant capricieux pour le moindre
signe de reconnaissance, et n’étant même plus capable de sentir la bassesse,
l’aspect minable d’un tel comportement. Nous vivons vraiment une époque de
décadence, car il y a quelques années, ils éprouvaient encore le besoin de se
cacher. Là ils n’éprouvent même plus de honte à être répugnants en public.
Incapable aussi du moindre courage, dès lors qu’une vraie adversité est en
face. Imagine le contraste donné en exemple, et les changements que cela
induirait dans la société. »
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