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mardi 29 septembre 2015

Vous avez dit subversif ?


La subversion ne consiste pas à mettre les rieurs de son côté, car les rieurs sont bien souvent les repus et les puissants. Auquel cas le rire devient une forme de collaboration, de soumission servile, celle des bouffons de cour.

Lorsque le rire devient l’instrument de son propre pouvoir ou du pouvoir des autres, l’esprit de finesse dont il se croit investi ne fait que masquer le plus banal des arrivismes.

La dérision systématique qui envahit certains de nos médias est de façon évidente une stratégie de tabula rasa visant à ne laisser la parole qu’à une seule opinion. Il nous est infligé un humour sinistre, accompagné par des commissaires du peuple grimés en clown, chargés de repérer et désigner ceux qui n’ont pas ri.

La subversion véritable consiste à ridiculiser les tartuffes, quel que soit le catéchisme qu’ils emploient, celui des anciennes ou des nouvelles dévotions.


De la libération sexuelle

Lorsque le film « La belle saison » est sorti récemment sur nos écrans, je me suis demandé combien de films nous pouvions compter dans les dernières années relatant les émois homosexuels de jeunes gens en recherche d’eux-mêmes. Le nombre de tels films est si grand que je me suis également demandé à partir de quelle quantité leur auto-proclamation comme champions de la subversion devenait le conformisme le plus courant.

La libération sexuelle se place en opposition au puritanisme issu des religions. Fort bien, mais il introduit un nouveau catéchisme tout aussi insupportable que l’ancien lorsqu’il se teinte d’hypocrisie. Le moralisme de l’immoralisme prononce des sermons pontifiants sur la nécessité absolue et obligatoire de briser toutes les frontières de la sexualité. Qu’importe que le message ait été inversé, le porno-chic comme le puritanisme en son temps ne reflètent que la volonté la plus banale de préserver un ordre établi.

Nos petits subversifs ne voient-ils pas que, de nos jours, prôner la libération sexuelle ou l’infidélité, c’est ramper devant les puissants ? Que loin de déranger l’ordre social, ce message ne fait que renforcer un peu plus les mœurs des nouvelles castes dirigeantes ? N’est-il pas évident que l’appétit de domination a remplacé l’accomplissement par la maîtrise de disciplines personnelles, et qu’il a investi la sexualité par extension du domaine de la lutte ?

La soi-disant « libération » accélère la constitution d’un vivier directement consommable par ceux qui peuvent y accéder, le rapport de domination sociale ayant remplacé le rapport sexuel. L’attitude « cool », « ouverte » et « humaniste » est le discours des modernes tartuffes, qui cachent derrière ces termes les pratiques dont ils ont besoin pour se sentir exister, qui n’ont d’ailleurs plus rien à voir avec la sexualité, mais beaucoup avec leur narcissisme.


De mai 1968 et du rapport au pouvoir

Plus le temps passe, plus il apparaît clairement que le seul et unique objectif que visaient les soixante-huitards était l’argent, le pouvoir et le sexe, le triptyque machiavélien. Ceci est effectivement d’une très grande originalité et d’une profonde subversion. Comme je ne suis pas moi-même un moralisateur, je ne leur reproche pas cet appétit, mais l’hypocrisie d’avoir prétendu faire autre chose.

La totalité de mai 68 peut se relire sous l’angle unique de la course au pouvoir et aux positions. Le bréviaire des soixante-huitards n’est pas Jacques Kerouac mais a posteriori « Game of Thrones », le jeu de la courtisanerie, des intrigues et du pouvoir à tout prix. En matière de philosophie politique, malgré les apparences qu’ils se donnent, tout peut se résumer chez eux à une seule œuvre, de surcroît assez vulgaire.

L’ensemble de la soi-disant « pensée » qui s’est développée à cette époque n’est qu’une immense auto-justification de ces buts qu’ils ne voulaient pas s’avouer. Travers humain peut-être, mais qu’ils ne viennent pas dans ce cas prétendre avoir de l’imagination. Contrairement à sa bruyante propagande – le seul art qui s’y trouvait maîtrisé – mai 68 fut une période extrêmement pauvre sur le plan de la pensée.

Les soixante-huitards se sont naturellement orientés vers les domaines de la superficialité et du frivole, parfois masqués sous le dehors sérieux de la philosophie : le verbiage hégélien fit merveille, celui des fabricants d’illusion et de poudre aux yeux, qui polluèrent l’université française pendant des décennies. Des « philosophes » appliquant les techniques de la communication, de la publicité et du marketing s’en suivirent naturellement.

Plus un homme cherche à se distinguer à tout prix, plus il est banal dans son besoin maladif de se faire valoir. Plus il recherche l’anonymat et l’absence d’esbroufe, plus il se révèle être un homme d’exception. Pour cette raison, le gentleman est et restera toujours la figure du subversif par excellence. Une chose que les soixante-huitards ne pourront jamais comprendre mais qui leur colle si bien, est cet aphorisme ensoleillé de Vladimir Jankélévitch, « l’ego est en raison inverse de la personnalité ».


De l’éducation nationale

Le summum de la subversion consiste aujourd’hui à enseigner les langues anciennes, le latin et le grec. En dehors des risques de persécution croissants auxquels s’exposent les pratiquants de ces disciplines sulfureuses, le latin et le grec donnent accès à une arme terrifiante : l’étymologie.

Il n’y a pas de meilleur outil favorisant l’égalité des chances et la mobilité sociale que l’étymologie. Car elle est un chemin d’accès aux clés de la maîtrise de la langue, pour les enfants issus de classes sociales modestes. Lorsqu’un enfant n’a pas eu la chance de naître entouré de toutes les références culturelles nécessaires à un haut niveau de langage, l’étymologie est le sentier qui lui permet de les rejoindre.

Il fut un temps où la gauche prônait l’objectif louable de donner au peuple une conscience lui permettant de s’extraire de sa condition. Il semble maintenant qu’elle estime plus simple et plus sûr de l’anesthésier lourdement.

Jamel Debbouze est présenté comme un parangon de la subversion par nos modernes tartuffes, qui savent pertinemment que cette médiocrité cantonnera les futurs citoyens à une imbécillité permanente. Le grec et le latin risquent fort en revanche de former des citoyens qui se mettent à réfléchir, parce qu’ils auront accès à l’origine des mots, empêchant que l’on en fausse tout à fait le sens. On comprend qu’une telle perspective inquiète beaucoup nos « subversifs ».


De l’universalisme et du patriotisme

Il fut considéré comme prodigieusement « subversif » de rabaisser, dénigrer, ridiculiser, toute forme d’attachement à la France. Les tartuffes oscillent toujours entre l’humour sinistre des arrivistes et les imprécations grandiloquentes. Il n’y eut pas d’exception pour le patriotisme, tantôt cible de moqueries, tantôt attaqué en procès d’opinion sous l’accusation de fascisme. Les mêmes « philosophes » continuateurs de 68 qui n’étaient que des communicants, trouvèrent intelligent d’opposer le patriotisme à l’universalisme, assimilant toute forme d’attachement à la France à un refus de l’humanité.

Comme au théâtre, les tartuffes finissent par être démasqués. Il ne leur était pas venu à l’idée que les cités grecques nous avaient légué nombre de nos idées universalistes, mais que l’attachement de chaque citoyen à sa mère patrie et à la défense de la cité étaient des valeurs qui ne faisaient pas même question. Il est décidément très dangereux et très subversif d’apprendre le grec.

Par la suite, avec le temps de retard que tous les opportunistes accusent sur les gens simples, ils découvrirent que leur intelligente et subversive opposition avait abouti à détruire des valeurs fondamentales de notre société, laïcité, liberté de conscience, respect du droit, pour faire surgir des communautarismes fondés sur la loi du plus fort, l’intimidation et le règne des caïds. Il est vrai que l’émergence des pègres est le désir secret et trouble de tous les tartuffes, désir d’autant plus puissant que leurs admonestations morales sont radicales.

« Cachez ce sein que je ne saurais voir ». Pour nos modernes tartuffes, c’est encore une poitrine conquérante que leur hypocrisie ne parvient pas à soutenir du regard : celle de la liberté guidant le peuple.

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